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Trois questions à Kévin CARILLO ET Alain KLARSFELD
"Plus une entreprise favorise la diversité, plus ses salariés s'impliquent"
Kevin CARILLO et Alain KLARSFELD, professeurs à TBS Éducation, montrent, à travers leur recherche avec Gaëlle CACHAT-ROSSET, de l’université Laval à Québec, l’impact positif des politiques diversité sur la performance moyenne des salariés.
Vous avez étudié l’impact de politiques diversité sur les perceptions de salariés de différentes organisations, qu’ils appartiennent ou non aux catégories historiquement dominantes. Quel bilan en tirez-vous ?
Nos recherches portent sur la façon dont les politiques de diversité sont perçues par l’ensemble des salariés, des perceptions que les chercheurs en gestion synthétisent par un indicateur, le climat diversité. Nous avons mesuré ce climat diversité dans différents établissements appartenant à de grandes organisations, en interrogeant les salariés sur leur perception des intentions de leurs dirigeants sur ces questions, sur les programmes concrets mis en œuvre pour favoriser la diversité, et plus généralement sur les attitudes et les comportements de leurs collègues vis-à-vis de la différence, au sens large du terme. Nous avons ensuite évalué l’impact de ces perceptions sur la satisfaction au travail des salariés, leur implication, leur sentiment d’appartenance, leur identification à leur organisation, et enfin, leur performance individuelle. Nous montrons que plus les salariés perçoivent que leur entreprise favorise la diversité dans ses paroles et dans ses actes, plus ils se sentent inclus dans le collectif, et de ce fait, plus ils s’identifient à leur organisation. Nous montrons également qu’ils sont plus satisfaits, plus impliqués à l’égard de leur organisation, ce qui influence favorablement leur performance. En outre, les salariés qui estiment faire partie d’une organisation plus ouverte à la diversité sont plus adaptables et plus proactifs.
Qu’est-ce qui vous a le plus surpris ?
C’est le fait qu’un bon climat diversité a plus de conséquences positives, en termes d’identification à l’organisation et de sentiment d’inclusion, chez les hommes que chez les femmes. Cela doit amener à relativiser le discours selon lequel les catégories historiquement favorisées sont réfractaires aux politiques diversité.
Pourtant, certaines catégories de population, traditionnellement avantagées dans les entreprises, se plaignent des politiques RH inclusives…
Les catégories historiquement surreprésentées dans les échelons les plus élevés de la hiérarchie – les hommes en bonne santé, d’origine européenne, de 30 à 60 ans – peuvent voir leurs intérêts menacés par les politiques diversité des entreprises dont l’objectif affiché est de promouvoir les personnes appartenant aux autres catégories. Concrètement, certains hommes peuvent craindre par exemple de voir une promotion leur échapper du fait de la mise en œuvre de ces politiques. Un cadre supérieur masculin d’une grande entreprise nous a ainsi expliqué qu’il avait vu le poste qu’il convoitait lui échapper en raison, selon lui, du soutien de la direction aux promotions féminines. Il en concevait un certain dépit. Les salariés de ce type sont, dans un tel contexte, très tentés de mettre en cause le bien-fondé d’une ouverture de l’entreprise à d’autres profils que le leur, non au titre de leur frustration, mais au nom de la performance…
Propos recueillis par Lys ZOHIN - Entreprise & Carrières
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